Dans son édition du 5 avril 2016, le magazine "Ville, Rail & Transports" publie un article intitulé "Grand Paris : les belles promesses de la ligne 18". 

Ce contenu est payant, mais nous avons été autorisés à en reproduire (ci-dessous) la section qui figure à la fin de l'article et qui résume et commente la position de COLOS, sous la plume de François Dumont, directeur de la rédaction du magazine, qui s'inspire de notre document "Questions-réponses relatives à la desserte du plateau de Saclay".

Le Colos contre les travaux pharaoniques

Un collectif d’associations du plateau de Saclay défend des solutions moins coûteuses que le métro, et qu’il juge beaucoup plus adaptées. Une opposition au métro qui ne désarme pas et remonte aux premiers temps du projet de Grand Paris.

Le 26 janvier 2011 est une date majeure du Grand Paris. Ce jour-là, Jean-Paul Huchon et Maurice Leroy peuvent enfin toper. L’accord, qu’il ne faut jamais manquer de dire historique entre la région et l’Etat, règle tout. Métro du Grand Paris et plan de mobilisation de la région ont fini par s’accorder. Tout est résolu, sauf un désaccord acté dans l’accord : la ligne 18. Le seul point sur lequel Maurice Leroy et Jean-Paul Huchon n’ont pu s’entendre. Comprenez-moi, argumente le ministre chargé du Grand Paris, si le président de la République veut un métro, je ne peux quand même pas aller contre sa décision. Vous savez bien, rétorque Jean-Paul Huchon, que si j’ai réussi à convaincre les écologistes d’accepter le Grand Paris, je ne peux tout de même par leur demander d’accepter un métro sur le plateau de Saclay.

Depuis qu’on parle de métro du Grand Paris, la ligne 18, d’abord appelée ligne Verte, cristallise l’opposition entre la vision de Christian Blanc et celle de Jean-Paul Huchon. Opposition maintes fois décrite. D’un côté un métro automatique reliant à grande vitesse les pôles économiques, les clusters et les aéroports. De l’autre un système de transport conçu pour les besoins des habitants.

Pour la ligne 15, il n’était pas si dur de faire coïncider les deux approches. Pour la 18, c’est beaucoup plus compliqué et ce n’est pas résolu. Et, alors que la SGP vient de lancer l’enquête publique d’un projet qui a pas mal évolué, les opposants ne désarment pas. Pour répondre à un dossier de presse très complet de la SGP, le collectif d’associations Colos a mis en ligne un « questions-réponses » relatives à la desserte de Saclay très dense et argumenté, que l’on peut résumer en quelques grands points.

  • La demande de transport ne justifie pas un métro. Aujourd’hui le BHNS transporte 3 000 personnes aux heures de pointe, pour un trafic total quotidien d’environ 4 000. La SGP table sur 4 500 passagers en pointe, et 6 000 à terme. Ce trafic, même s’il est atteint, ne nécessite pas un moyen aussi lourd.
  • 20 % seulement des gens qui travaillent sur le plateau de Saclay viennent de la petite couronne et ont besoin du métro. L’énorme majorité vit dans l’Essonne ou les Yvelines, au pied du plateau. Or, au nord et au sud, passent deux lignes de RER, la C et la B. Les besoins locaux comme ceux des passagers du RER venant de plus loin pourraient être satisfaits par des téléphériques partant des gares.
  • Le travail-travail représente 3 % des motifs de déplacement. On ne va pas faire un métro pour ça, plaide Colos.
  • Les implantations sur le plateau de Saclay étant diffuses (et étant selon le collectif appelées à le rester, quel que soit le destin du cluster), une desserte fine, sur le plateau lui-même, de type BHNS, tramway ou tram-train est beaucoup plus judicieuse. Et le covoiturage en complément trouve ici toute sa pertinence.
  • Le Colos ne croit pas aux anticipations sur la croissance à venir, se méfiant du mécanisme selon lequel on justifie une infrastructure par un trafic, des coûts, des délais et des perspectives économiques assez optimistes pour qu’on ne puisse pas y renoncer…
  • Ces discussions seraient oiseuses si l’on avait plein d’argent, pour investir et puis faire fonctionner le système. Mais que fait-on quand les financements sont rares ? Les économistes du Cercle des Transports ont tiré le signal d’alarme, et la Cour des comptes dans son dernier rapport annuel a clairement dit : la priorité c’est le renouvellement du réseau existant.

Ajoutons à l’argumentation de Colos ceci, qui va dans son sens : il y a un après-Brétigny dont les effets se font de plus en plus sentir. Or la maintenance et la rénovation sont coûteuses. 800 millions par an pour le réseau SNCF d’Ile-de-France, que l’on ne parvient pas encore à réunir. La ligne 18 est aujourd’hui estimée (avant les réévaluations d’usage) à près de 3 milliards d’euros. Soit trois ans et demi de maintenance et rénovation du réseau d’Ile-de-France. Ou quasiment le montant du prolongement d’Eole. Or, quand on voit les énormes difficultés que l’on a à boucler le financement de ce projet qui concerne des centaines de milliers de personnes, on peut se demander : un, si un tel effort est légitime pour la ligne 18 et, deux, si l’on peut parvenir à le fournir.

Le Colos n’est pas seul à contester le métro du plateau de Saclay. Le Front de gauche a, lors de la campagne pour les régionales, présenté une option différente : un métro pourquoi pas, mais qui s’arrête à Gif, le trafic au delà ne justifiant pas un mode lourd. En revanche l’idée serait de prolonger ce tronçon à l’est, vers Villeneuve-Saint-Georges où il y a plus de trafic. Et où l’arrivée de la ligne 18 pourrait soulager le RER D.

Toujours est-il que Valérie Pécresse, à la différence de Jean-Paul Huchon est, elle favorable, à la réalisation de la ligne 18. Ministre pendant quatre ans de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, elle est attentive au développement de Paris-Saclay. Mais, lors de sa campagne, consciente des difficultés de financement, elle voulait pousser les solutions de type PPP pour la réalisation des lignes 16, 17 et 18 du Grand Paris. Une ligne 18 qui n’a pas fini de se chercher.