Mise à jour : 15 septembre 2024
Nos contributions dans le cadre des consultations
Le Conseil régional d'Île-de-France (« la Région ») a décidé la mise en révision le Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF). C'est le document d'urbanisme du plus haut niveau, qui s'impose aux documents de rang inférieur, en particulier le Schéma de cohérence territoriale (SCoT), le Plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) et le Plan local d'urbanisme communal (PLU).
Pour souligner les aspects environnementaux du futur schéma, la Région l'a baptisé SDRIF-Environnemental (SDRIF-E). On note toutefois que dans son avis Note d'enjeux de l'État – publié pour le compte de l'État par la Direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports (DRIEAT) Île-de-France – l'État ne s'embarrasse pas de cette préoccupation et continue d'évoquer simplement le SDRIF.
Au terme d'une phase de consultation du public et des élus, une première version du nouveau SDRIF est prévue pour le printemps 2023. Après mise au vote des élus régionaux, elle sera mise en enquête publique. L'adoption finale par les élus régionaux, suivie de l'approbation du Conseil d’État devrait avoir lieu en 2024.
En décembre 2022, dans le cadre de la concertation préalable, COLOS a déposé un avis, conjointement avec le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG)COLOS a déposé un avis, conjointement avec le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG)COLOS a déposé un avis, conjointement avec le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG)COLOS a déposé un avis, conjointement avec le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG), qui lutte contre l'urbanisation des terres agricoles du Triangle de Gonesse au nord de Paris.
Notons également la contribution de l'UASPS et celle d'ENE. Tous ces avis sont complémentaires au cadre défini par FNE Île-de-France : « 10 mesures pour réussir le SDRIF-E ».
L'enquête publique a eu lieu en février-mars 2024. COLOS s'associe aux avis déposés dans les registres de l'enquête par FNE Île-de-France, l'UASPS et ENE.
Concepts erronés et incohérents du projet de SDRIF-E
L'article À la recherche du polycentrisme francilien, publié le 9 septembre 2024 sur le site Métropolitiques, démontre que la vision, tant de la Région que de l'État, repose sur des concepts erronés et contradictoires entre eux.
La Région a certes raison de souhaiter une structure polycentrique de l'Île-de-France ; ce souhait est d'ailleurs reconduit de SDRIF en SDRIF. Mais ce qui est proposé pour le nouveau schéma est un polycentrisme en trompe-l'œil, car en décalage complet avec l’aggravation sans précédent de la concentration socio-économique au cœur de l’hypercentre francilien. D'autant plus que cet objectif est en totale contradiction avec cet autre objectif d'une « Île-de-France connectée ». Les décideurs régionaux ne semblent pas vouloir comprendre qu'un réseau de transport puissant reliant des centralités secondaires entre eux va à l'encontre de l'autonomie dont ces pôles ont besoin pour prospérer et être vivables. Si l'on veut atteindre ces objectifs affichés par la Région : « en finir avec le métro-boulot-dodo » pour créer « une région des 20 minutes » qui permettrait « un “esprit village” avec des villes humaines, multiservices, à la place des banlieues dortoirs », l'hyperconnexion est bien la dernière des choses à faire, puisqu'elle aboutit au renforcement de l'actuelle région monocentrique. Sans même parler de leur coût, l'introduction de « transports collectifs toujours plus performants » provoque l'effet rebond des ménages se relocalisant plus loin en périphérie, là où le logement coûte moins cher et/ou est plus proche de la nature ; de même, des entreprises se relocalisent en espérant réaliser une meilleure productivité et/ou une future plus-value immobilière ; dans les deux cas, c'est le marché du foncier et de l'immobilier qui alimente cette dynamique urbaine ignorée par les concepteurs du SDRIF-E. Les pôles urbains dont ces derniers voudraient qu'ils deviennent des centralités secondaires se transformeraient en réalité en « pôles dissociés » (ceux qui y habitent n’y travaillent pas, ceux qui y travaillent n’y habitent pas). Ce phénomène va immanquablement se produire au sein du pôle Paris-Saclay, où, grâce à la ligne 18, s'installeront des ménages ayant Paris comme lieu d'emploi et où cette ligne permettra aux travailleurs d'habiter loin de leur lieu d'activité au lieu de s'en rapprocher.
Autre grosse méprise : la notion de « bassin de vie », dont la Région introduit sa propre définition très différente de celle de l'Insee, qui fait office de standard. La Région en définit une quinzaine pour toute l'Île-de-France, ce qui n'a que très peu de rapport avec la réalité du terrain. Ainsi, il existerait selon la Région un bassin de vie englobant les pôles urbains de Massy, Saint-Quentin-en-Yvelines et Versailles. C'est du même tonneau que le prétendu « bassin d'emploi Versailles-Saclay », inventé par l'Insee en collaboration avec l'EPAPS. Pourtant, Jacqueline Lorthiois a clairement démontré que les échanges domicile-travail entre l'est et l'ouest du plateau de Saclay sont extrêmement faibles, ce qui ne devrait étonner personne vu qu'entre les deux extrémités se trouvent quelque 4000 ha d'espaces agricoles et naturels.
Vétusté de la procédure des enquêtes publiques
Ce projet de SDRIF-E bancal a été voté par la Région le 11 septembre à la suite de l'enquête publique citée plus haut. Les citoyens ont déposé plus de 8600 avis dans les registres de cette consultation, mais la commission d'enquête n'y a trouvé aucune matière à émettre des réserves et a donc formulé un avis favorable assorti seulement de 36 recommandations anodines que rien n'oblige de prendre en compte. La commission d'enquête était présidée par M. Jean-Pierre Chaulet, ancien général de gendarmerie, qui a également supervisé les enquêtes publiques de plusieurs lignes du Grand Paris Express ; rappelons qu'au cours de celle de 2016 concernant la ligne 18, il a publiquement déclaré qu'il lui était impossible de donner un avis défavorable.
Tout cela montre, une fois de plus, que cette vieille pratique des enquêtes publiques, qui date de l'Ancien Régime, n'est qu'une parodie d'outil de concertation méritant un grand coup de balai. C'est d'ailleurs ce que préconise l'historien de l'environnement Frédéric Graber dans son livre « Inutilité publique » (éd. Amsterdam, 2022), qui constate que cette procédure sert essentiellement à donner une légitimité à des projets d'aménagement et non à réellement débattre avec les citoyens sur le bien-fondé de ces projets. Il stipule aussi que cette mécanique a été conçue pour « intensifier l’exploitation de la nature » car le principe sous-jacent est que le développement économique – censé profiter à tout le monde, donc être d'utilité publique – doit l’emporter sur tout. Les conséquences environnementales et sociales des projets sont donc négligées, ce qui n'est plus du tout acceptable à notre époque.