Enquête publique sur l'aménagement de Corbeville

Détails

Jusqu'à présent, les projets d'aménagement de la frange sud du plateau de Saclay concernaient deux secteurs, celui du quartier de l'École polytechnique et celui du plateau de Moulon. En voilà un troisième qui fait surface : le secteur de Corbeville, situé entre les deux autres : un arrêté préfectoral du 20 mars 2015 a prescrit l’ouverture de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique de l’aménagement du secteur de Corbeville, sur le territoire des communes d’Orsay et de Saclay. Cette enquête a eu lieu du 13 avril au 5 mai 2015. Le dossier soumis à enquête, ainsi que les modalités pratiques de l'enquête sont présentés sur le site de l'EPPS.

Certes, ce n'est pas la première fois qu'on évoque l'aménagement du secteur de Corbeville ; celui-ci figure entre autres dans le projet de CDT Paris-Saclay Territoire Sud, porté en enquête publique du 17 novembre 2014 au 15 janvier 2015, où on pouvait lire ceci :

"L’ambition du projet est de fabriquer un quartier propice à la rencontre et à la synergie des différents acteurs recherchée dans le cadre du projet Paris-Saclay et de la vie de campus. Les objectifs de l’aménagement sont les suivants :

  • aménager l’articulation entre le quartier de l'École polytechnique et le Moulon ;
  • développer un quartier mixte de logements, d’activités économiques, de services, commerces et d’équipements, en particulier sportifs ;
  • intégrer dans son environnement : développer le rapport aux coteaux boisés et aux espaces agricoles ;
  • travailler les liens plateaux-vallée ;
  • intégrer le TAL et le TCSP dans un maillage viaire reconfiguré.

Le quartier de Corbeville doit bien servir de lien, de charnière entre les deux quartiers majeurs du Sud plateau accueillant l’opération campus, le quartier du Moulon et le quartier de l’École polytechnique."

Mais comme le confirme le dossier d'enquête : "à ce jour, contrairement aux quartiers du Moulon et de l’École polytechnique, aucune maîtrise d’œuvre de conception urbaine n’a été sélectionnée pour le secteur de Corbeville" ou encore : "L’aménagement présenté ici pour Corbeville a une valeur symbolique, il n’est pas assimilé à un schéma directeur". Autrement dit : il n'y existe pas pour l'instant de projet concret d'aménagement.

Alors pourquoi cette enquête publique, dont l'EPPS ne cache pas l'urgence ? C'est que des ZAD (zones d'aménagement différé) avaient été mises en place en 2009 et qu'elles arrivent à expiration en septembre 2015. La déclaration d'utilité publique permettra à l'EPPS d'exproprier les terrains qu'il destine à l'urbanisation.

Les "intentions et objectifs du projet" sont énoncés en des termes on ne peut plus flous :

"Le secteur de Corbeville s’inscrit dans la programmation et dans les grandes orientations urbaines développées à l’échelle de la frange Sud du plateau de Saclay par le groupement Michel Desvigne Paysagiste.

Ces grands principes seront des données d’entrée pour le futur projet :

  • La chaîne des espaces majeurs : plusieurs espaces emblématiques ponctuent le sud plateau et forment une ligne d’est en ouest. Parmi les composants de cette chaîne, on retrouve d’est en ouest le quai de Polytechnique, le Green, l’axe central des écoles, la terrasse de Corbeville et le Deck ;
  • Le système de parcs : un ensemble d’entités paysagères de tailles, de typologies, de fonctions et de modes de gestion différents, réparti en deux catégories, paysages naturalistes et paysages intermédiaires et permettant la transition entre la frange urbanisée et les terres agricoles du plateau ;
  • Les trames et mobilités structurantes : le maillage du sud plateau de Saclay a été pensé dans son ensemble, incorporant Corbeville très tôt en amont des réflexions."

(…)

"Pour l’EPPS, les objectifs de l’aménagement de ce secteur comme pour les quartiers attenants, sont d’ores et déjà les suivants :

  • Développer un quartier mixte de logements familiaux et étudiants, d’activités économiques, de services, commerces et d’équipements, en particulier sportifs. A noter qu’il n’est pas prévu de programmation en lien avec l’arrivée d’établissement d’enseignement supérieur et de recherche ;
  • Aménager l’articulation entre les quartiers de l'École polytechnique et du Moulon ;
  • Intégrer le quartier à son environnement : développer le rapport aux coteaux boisés et aux espaces agricoles ;
  • Travailler les liens plateau-vallée ;
  • Intégrer la RN 118, le métro du Grand Paris Express et le TCSP dans un maillage viaire reconfiguré ;
  • Préserver le patrimoine existant (château de Corbeville)."

(…)

"Compte tenu de l’absence d’étude spécifique à ce quartier et par conséquent de partis d’aménagements contrastés, la programmation précise n’est pas encore arrêtée pour ce futur quartier. Le but n’en est pas moins la réalisation d’un quartier de ville équilibré comportant toutes les aménités utiles aux habitants (familles et étudiants) et aux usagers : services, commerces, équipements de proximité et activités économiques sur une superficie de près de 75 ha. Il s’agit donc d’un projet très important pour le développement du sud plateau de Saclay. "

La conclusion est tout aussi creuse :

"Le développement du secteur de Corbeville répond à la volonté de créer un cluster dynamique et de prendre part au développement du Grand Paris. Ainsi, il accompagnera la montée en puissance scientifique et économique de Paris-Saclay comme un pôle de l’innovation de rang mondial. Il va également permettre de diversifier l’offre de logements et d’activité économique existante sur le territoire des communes concernées et proposer des commerces, services et équipements adaptés aux habitants, étudiants et salariés pour permettre la création d’un nouveau quartier formant un lien entre la vallée et le plateau.

Cette opération permettra de répondre à plusieurs objectifs à différentes échelles :

  • A l’échelle du quartier, de valoriser un site qui a aujourd’hui peu de qualités et aucune animation urbaine. L’aménagement de ce secteur en quartier urbain permettra de structurer l’espace public et d’offrir de nouveaux espaces de vie et de travail à ses futurs habitants et utilisateurs.
  • A l’échelle locale, de créer un lien d’est en ouest du campus Paris-Saclay, en plaçant un quartier mixte et vivant en son cœur géographique.
  • A l’échelle des communes d’Orsay et de Saclay, de faire émerger un pôle d’attraction économique et scientifique mais aussi résidentiel.
  • A une échelle plus large, le projet urbain permettra l’amélioration de la qualité urbaine du campus Paris-Saclay et donc son attrait. La création de logements familiaux et étudiants permettra de répondre à des besoins actuels et futurs franciliens très forts. L’offre d’habitat sera diversifiée sur le territoire afin de faciliter les possibilités de parcours résidentiels pour la population.

Cette opération permettra en outre de favoriser le développement économique et la création d’emplois sur le secteur. Enfin, elle permettra de compléter et finaliser le campus urbain, en développant un quartier vivant au cœur de la frange Sud du Plateau.

Toutes ces raisons justifient le caractère d’utilité publique de ce projet."

Nous ne sommes nullement convaincus par ces discours fumeux. Et surtout, nous contestons la nécessité et l'utilité d'urbaniser ce secteur, ce qui ne ferait qu'accentuer l'hypertrophie du "campus urbain" et diminuer d'autant ses chances de succès. En dehors des liaisons de transport, la meilleure "articulation" entre les secteurs de Polytechnique et de Moulon serait un espace de respiration !

Rappelons qu'en visant une population de 71 000 chercheurs et étudiants, le projet Paris-Saclay se targue de créer un campus deux fois plus grand que celui de l'université californienne de Berkeley. Or, dixit le récent prix Nobel Jean Tirole, "le standard international pour les universités de recherche intensive est de 10 000 à 15 000 étudiants, avec quelques exceptions jusqu’à 30 000. Au-delà, la structure devient trop grosse pour être gérable." Par conséquent, avec son esprit de gigantisme mégalomaniaque, l'EPPS réunit toutes les conditions pour torpiller son propre projet.

Alors, arrêtons le massacre, limitons l'urbanisation de Corbeville à la réhabilitation ou la transformation des locaux déjà installés au Sud de la RD 128 et ne touchons pas aux terres agricoles fertiles qui jouxtent le site de la Martinière !

Dans l'avis de COLOS, ces points ont été développés, en rappelant auparavant les éléments du contexte, de façon à renseigner le commissaire-enquêteur sur la place de l'aménagement du secteur de Corbeville dans celui de l'ensemble de la frange sud du plateau et de bien mettre en évidence le manque de pertinence et la démesure de ce projet.

D'autres avis associatifs qui nous sont parvenus :

et quelques avis personnels :

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