C'est sous ce titre « Les écueils du Grand Paris Express » que la revue scientifique en ligne Métropolitiques a publiz, dans son édition du 27 juin 2019, un article rédigé par Jacqueline Lorthiois, urbaniste socio-économiste, et Harm Smit, coordinateur de COLOS.
Un objectif majeur de cet article est de démontrer que l'approche actuelle d'aménagement de l'Île-de-France, où les emplois sont toujours plus concentrés dans une poignée de communes, est vouée à l'échec, car générant chaque année des besoins de déplacement supplémentaires.
Les transports continuent d'être conçus comme un domaine autonome, déconnecté des autres fonctions urbaines et capables de structurer l'agencement de la ville. Bien que ce mode de pensée ait fait la preuve de son inadéquation, il inspire toujours très largement les décisions politiques comme le montre la Loi d'orientation des mobilités. Dans la réalité, les problèmes de mobilité découlent en grande partie d'un aménagement du territoire régional défaillant.
Au lieu de soulager la situation, le Grand Paris Express va alimenter la spirale infernale en favorisant l'étalement urbain, la ségrégation sociale et la gentrification galopants, contrairement à ce qu'affirme la Société du Grand Paris. Les lignes 18 et 17 Nord, ainsi que la majeure partie de la ligne 16, sont citées comme exemples de ce qu'il faudrait ne pas faire.
Le meilleur transport est celui qu'on évite : le plus rapide, le moins cher, le moins polluant, le moins émetteur de CO2. Pour aller vers une « ville cohérente », aux faibles distances domicile-travail, il faudra mettre les bœufs de l'aménagement avant la charrue des transports en adoptant une approche systémique.
« Il faut revenir à un système polycentrique avec des bassins d’habitat qui soient aussi des bassins d’emplois et de vie. Plutôt que de construire des transports lourds qui traversent les territoires sans les desservir, il faut préférer des modes plus légers qui maillent l’espace local avec du cabotage entre communes. Le but serait de créer des « zones intenses » fondées sur les échanges internes et de diminuer les déplacements lointains. Cela suppose de relocaliser très fortement les activités économiques dans les zones d’habitat et de cesser de faire croître des pôles d’emplois sans ou avec peu d’habitants, comme Roissy, Orly et La Défense, avec des projets contestés comme l’urbanisation du Triangle de Gonesse et du plateau de Saclay. Il faut aussi reconstituer un tissu d’activités dans des centres-villes désertés en grande banlieue (Meaux, Melun, Évry, Pontoise, Sarcelles…). Un modèle à suivre est le bassin de Saint-Quentin-en-Yvelines-Versailles, zone intense réussie où 57 % des résidents habitent et travaillent dans un quadrilatère de 15 km sur 7 et où 83 % de la main-d’œuvre ayant un emploi exerce son activité dans les Yvelines. »